« Aux Samoa, le rugby est encore plus puissant qu’en Nouvelle-Zélande »

Gauthier Baudin est journaliste spécialisé dans le rugby. En freelance, il écrit pour RMC, Midi Olympique, ActuRugby et L’Equipe. Après avoir couvert la Coupe du Monde féminine en Nouvelle-Zélande l’an passé, il est resté un an sur les terres des « All Blacks ». L’occasion pour lui de passer dix jours sur les îles Samoa et de découvrir l’impact du rugby dans cet archipel du Pacifique. Témoignage.

Quelle place à le rugby dans la société samoane ?

C’est simple, tout le monde joue au rugby, et tout le temps. En Nouvelle-Zélande, les terrains vagues sont utilisés pour jouer au rugby ou au cricket. Aux Samoa, il n’y a que du rugby. C’est presque religieux, et ce n’est pas rien pour un pays très croyant. Le dimanche matin, les Samoans vont à l’Église, l’après-midi, ils jouent au rugby. D’abord les enfants, puis les hommes et les femmes. C’est encore plus puissant qu’en Nouvelle-Zélande. Le rugby est roi et le sélectionneur de l’équipe nationale masculine, Seilala Mapusua m’a même parlé d’un « trésor national ».

Quel est le parcours classique des joueurs de rugby aux Samoa ?

Dans ce pays, la progression passe énormément par le système scolaire. D’ailleurs, à part l’Apia Park, l’équivalent du Stade de France aux Samoa, il y a peu de terrains de rugby en dehors des écoles. Le rugby dans les écoles, c’est une véritable institution. J’ai eu la chance d’être aux Samoa pendant le tournoi des collèges, et c’était une grande fête. Toutes les écoles du pays s’étaient retrouvées pendant une semaine et ça n’arrêtait pas de jouer. J’ai vu des supers moments, comme quand des adolescents ont consolé leur adversaire. Malheureusement, le schéma classique, c’est que les espoirs samoans partent pour la Nouvelle-Zélande ou l’Australie en bénéficiant d’une bourse d’étude.

Le tournoi des collèges rassemble chaque année toutes les écoles samoanes autour de la pratique du rugby, qui se fait toujours dans le respect.
Crédit Photo: Gauthier Baudin.

Pourquoi ce choix ?

Le nerf de la guerre, c’est l’argent. Les Samoa ont beau être un vivier de talent rugbystique, l’archipel reste très pauvre et la fédération samoane l’est également. Pendant la Coupe du Monde, les frais sont couverts par World Rugby (NDLR, la fédération internationale de rugby), mais sinon, la fédération ne peut pas tout payer. On a déjà vu des joueurs devoir régler leurs billets d’avion pour se rendre dans leur pays et jouer pour les Samoa. Certains Samoans hésitent à jouer pour l’équipe nationale parce qu’ils perdent de l’argent.

La Coupe du Monde de rugby en France est l’occasion pour eux de se montrer aux yeux du grand public.

Tout à fait. Dans leur poule, les Samoa peuvent légitimement espérer se qualifier en quart de finale. Ils s’appuient sur des joueurs très performants, à l’image du géant Théo McFarland. Ils bénéficient également d’une nouvelle règle de World Rugby, qui édicte que les joueurs n’ayant pas connu de sélection avec leur équipe nationale depuis trois ans peuvent jouer pour un autre pays, à condition d’avoir au moins un grand-parent né dans le pays en question. Résultat, plusieurs joueurs néo-zélandais et australiens sont revenus jouer pour le pays d’origine, les Samoa. Si l’on rajoute à ça le développement des joueurs samoans à travers l’équipe des Moana Pacifika en Super Rugby (NDLR, le plus grand championnat de clubs de l’Hémisphère Sud), on ne peut qu’être optimiste pour cette Coupe du Monde.

Propos recueillis par Gabriel Garrouste.

Pour les plus curieux, Gauthier Baudin a publié une vidéo YouTube sur son voyage dans l’archipel samoan. https://www.youtube.com/watch?v=rrwaJvgVR8w

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