“Notre pays, c’est la République Démocratique du Congo, mais malheureusement, il n’y a pas la démocratie”

L’Inspo a eu l’occasion de rencontrer Cathy Wena, réfugiée congolaise, résidant en France depuis 2022, à la suite d’une table ronde organisée par Paroles d’exil, Sexprimons Nous et Guerre et Paix, autour du continuum de violences subi par les femmes exilées. Son témoignage et son parcours sont bouleversants et constituent une clé indispensable pour comprendre la situation actuelle en République Démocratique du Congo (RDC).

Trigger Warning : cet article aborde des faits de crimes de guerre et de violences sexuelles

Je travaillais en tant qu’infirmière dans une clinique. J’étais aussi fonctionnaire au Ministère du Développement Durable. Là, j’étais chargée de recherche et de développement. 

Et expliquer pourquoi je suis partie, c’est une longue histoire. En 2013, j’ai adhéré à un parti politique, le PALU [ndlr, le parti lumumbiste unifié (de gauche)]. Après, j’ai vu que ma vision et celle du parti ne marchaient pas ensemble. D’autant plus que ce parti avait adhéré au parti du président Joseph Kabila alors qu’il était déjà au pouvoir. Il donnait des injonctions et on n’avait pas le monopole de la parole. Le parti était un parti socialiste où nous voulions le développement du pays, qu’il y ait du travail, que les Congolais puissent bien vivre, puissent bénéficier de la richesse du pays, avec l’égalité de droit et la liberté d’expression. Ça, ce sont les objectifs, mais on ne pouvait pas les mettre en place. Il n’y avait pas moyen de revendiquer quoi que ce soit, le leader était comme un dictateur. J’ai donc adhéré à un autre mouvement : LUCHA.

C’est un mouvement de jeunes, créé en 2012 par certains étudiants de Goma parce qu’ils voulaient faire échec à la candidature de Kabila, qui s’éternisait au pouvoir. Ce mouvement voulait le développement d’une vraie démocratie. Notre pays, c’est la République Démocratique du Congo, mais malheureusement, il n’y a pas la démocratie, il n’y a pas la liberté d’expression. Donc vous ne pouvez qu’appuyer ce que le gouvernement fait, et si vous critiquez, c’est un problème. LUCHA est un mouvement, et pas un parti, donc on peut davantage s’exprimer. 

On luttait pour une meilleure gestion des services publics, pour la dignité humaine et pour la justice sociale. Parce que c’est l’injustice qui règne là-bas. Ceux qui ont l’autorité, ont l’argent et peuvent manipuler la justice. Donc on ne peut pas te donner raison. Alors il y a beaucoup de mauvaises choses qui se passent : la mauvaise gestion des services publics, les arriérés [ndlr, les retards de salaires]… Il y a beaucoup de mauvaises choses. On s’opposait au gouvernement, on allait dans la rue et on manifestait. Nos actions ont abouti, elles ont même atteint l’échelle internationale. Par exemple, on s’opposait au fait que Monsieur Kabila se présente pour un troisième mandat car c’est contraire à la Constitution. C’est un mouvement qui a eu de l’écho à Goma et à Kinshasa parce qu’on revendiquait de manière pacifique. Finalement, il n’a pas pu modifier la Constitution et se présenter pour le troisième mandat. C’était déjà super bien. Il y a des actions que l’on a vraiment réussi à faire.

Après en 2019, j’ai eu une proposition de poste comme conseillère du Ministre dans la province du Sankuru [ndlr, province au centre de la RDC], par un député que je connaissais du PALU mais qui ne savait pas que j’étais de LUCHA. A ce ministère, il y avait un homme politique nommé Monsieur Mendé qui avait déjà fait 12 ans au ministère. Il avait beaucoup travaillé pour le Président Mobutu et avec le Président Kabila, la personne qu’on combattait. Il a fait beaucoup de choses qui ont fait pleurer le peuple congolais. Même au sein de la province, personne ne voulait qu’il soit gouverneur parce qu’il manipulait le gouvernement pour être candidat unique et il ne développait pas la province. Là-bas, il y a de la richesse, il y a de l’or, des diamants, des carrés miniers mais il n’y a ni asphalte ni courant. D’autant plus qu’il passait par la violence. Chez les Sankurus, il y a deux tribus. Il y a une guerre tribale entre eux et ils s’entretuent. Lui, il finance sa tribu pour qu’elle puisse combattre et tuer. Il a beaucoup œuvré dans la politique. Il a toujours voulu être à la tête des institutions et manipuler pour son propre intérêt mais il n’a rien fait pour la province. Au contraire : il tue la population.

« J’ai divulgué les informations à LUCHA parce qu’il y avait violation des droits de l’homme. Ils organisaient et planifiaient des enlèvements avec le groupe paramilitaire. »

A la LUCHA, nous luttons contre ces régimes politiques, contre ceux qui ne respectent pas les textes légaux, contre les politiciens qui passent par la violation et par la corruption au profit de leur pouvoir. Lorsque je suis arrivée là-bas, nous étions en période électorale. Il y avait déjà beaucoup de problèmes. J’ai donc commencé à rechercher des informations pour qu’il ne puisse pas diriger la province du Sankuru. Monsieur Mendé était à Kinshasa mais mon chef direct, le ministre, était de son parti et le gouverneur était de son parti, donc il y avait beaucoup de personnes de son parti. J’habitais chez le député qui m’a invité parce que je ne connaissais personne. J’étais toujours avec eux et donc tout ce qu’il se passait je le transmettait à mon mouvement. Comme j’étais une femme, et que je n’étais jamais avec la population parce que je ne connaissais personne, ils ne se doutaient pas, ils me faisaient confiance. J’ai divulgué les informations à LUCHA parce qu’il y avait violation des droits de l’homme. Ils organisaient et planifiaient des enlèvements avec le groupe paramilitaire. Je ne pouvais pas me taire. Je veux le changement du pays, que les choses aillent de l’avant. Mais avec un gouvernement comme celui-ci, ce n’est pas possible. LUCHA est ensuite allé voir le Maire et a organisé 2 manifestations contre la candidature de Monsieur Mendé, notamment parce qu’il voulait déplacer la ville administrative au lieu de la développer. 

Lorsqu’il y a eu les marches, la population se révoltait et ceux de Mendé ne comprenaient pas. Comment des choses qui ont été discutées en secret sont connues de la population ? Ils se posaient des questions mais ils ne pouvaient pas savoir que c’était moi. Ce jour-là, il y a eu 2 morts, 7 maisons ont été brûlées et il y a eu beaucoup de blessés. Cela a en fait aidé, cette histoire s’est su dans le monde entier, RFI, France 24, partout. Il a fallu qu’il y ait des soulèvements pour que les autorités se saisissent de cette affaire en vue de trouver une solution. Finalement, ils ont décidé qu’il ne pouvait pas être candidat unique, et cela a fait échouer sa candidature. 

Quelques jours après, il y a eu des rumeurs sur une fuite d’informations dans mon ministère. Un soir, le conseiller juridique du gouverneur m’appelle. Je me contrôlais pour pas qu’il ne comprenne que c’était moi, mais je n’ai pas pu fermer l’œil de la nuit. Deux jours après, je commençais déjà à réfléchir à comment faire. Je suis allée voir le gouverneur pour lui expliquer que ma mère était sérieusement malade. En 2016, mon père est décédé donc je me suis servie de ça. Il avait de la compassion pour moi, je lui ai dit qu’il ne me restait que ma mère et mes enfants, qui sont sous ma charge car leur papa est décédé et que ma mère est très malade. Je lui ai donc demandé s’il était possible de m’accorder quelques jours de congés pour que j’aille la voir. C’est comme ça que je me suis échappée de cette histoire. Il m’a dit : “il n’y a pas de soucis, dans ce cas tu rédiges une lettre parce que tout doit passer par l’administration”. Je suis alors allée dans un endroit un peu reculé, parce qu’ils commençaient à interpeller des personnes. Je suis restée dans la clandestinité pendant 3 ans.

J’ai alors repris ma fonction d’infirmière dans le privé. Puis j’ai reçu une lettre de notification pour que je puisse commencer à travailler en tant que fonctionnaire de l’État pour que je combine les deux. J’y suis allée le 1er avril 2022, je ne pourrai jamais oublier cette date. Je suis allée signer mes fiches d’identification afin de régulariser ma paye parce que je n’étais pas payée. L’Etat congolais c’est ça, depuis 2018 je suis immatriculée mais je n’avais pas de salaire. C’est là que, par coïncidence, j’ai revu le député qui avait organisé la marche, dans le bureau de mon chef, car ils étaient amis. C’est ici que mon malheur a commencé. Mon chef lui avait donné toutes mes informations. Le député était toujours en fonction, il était président du conseil d’administration de l’union maritime congolaise, et il adhérait au parti du président actuel. Donc il avait du pouvoir, ces personnes là peuvent tout faire. Il m’a demandé pourquoi j’avais fui le Sankuru et je lui ai répété que c’était parce que ma mère était malade, ce à quoi il m’a répondu «toi tu ne peux pas nous échapper, on ne nous défie pas». 

2 semaines après, c’était le pire cauchemar. On m’a enlevée, on m’a emmenée dans leurs locaux, torturée, battue. Ils ont décliné mon identité, ils ont su que j’étais de LUCHA. Ils voulaient que je dise à qui j’avais transmis les informations, les dossiers classifiés. Mais j’avais peur, je me disais que si je citais des noms, ils pouvaient être recherchés et battus. Je sais bien comment les choses se passent. En plus, à la LUCHA parmi nos principes, il faut assumer, si on t’attrape, tu assumes, parce que le risque est permanent, on peut être arrêté à tout moment et on nous arrête beaucoup. J’ai regardé récemment sur Internet, il y a eu des manifestations pour dénoncer le génocide et on a attrapé certains de mes amis. Vous ne pouvez rien dire, vous ne pouvez pas revendiquer. Pourtant le Président actuel est d’un parti démocrate. Il condamnait les actions de Kabila comme nous mais depuis qu’il est au pouvoir il nous tue et nous maltraite même plus que le président Kabila. C’est le Congo. Vous ne pouvez pas revendiquer, vous ne pouvez qu’appuyer le mal. 

Le huitième jour de séquestration, j’étais très fatiguée, un des agents a pris un bâton et m’a tapait. Je suis tombée, j’avais une fracture ici [elle montre son avant-bras], j’ai voulu me lever, j’ai sentie le déséquilibre. J’avais perdu la sensibilité. Mon bras s’était cassé, je sentais une douleur atroce. Je pleurais comme je n’ai jamais pleuré ce jour-là et mon bras gonflait. Un agent, parce qu’ils étaient 2, en voyant cela, est allé chez leur directeur. 20 minutes après, ils sont venus, ils ont pris un habit pour me le mettre comme une attelle, pour supporter mon bras, et m’ont emmené dans leurs bureaux. Ils m’avaient attribué beaucoup d’infractions : incitations à la haine contre l’Etat, agitation à l’ordre public, détention illicite de documents de la République. Pour eux, s’il y avait du désordre, c’était à cause de moi. L’officier me disait : «tu es une femme, nous savons que tu as trois enfants, nous sommes prêts à te faire du mal avec tes enfants». 

« Là je me suis dit, je dois tout faire pour quitter ce pays, si je reste, ce sera ma mort. »

Ma mère ne savait pas où j’étais. Elle est allée à la police, porter plainte, lancer un avis de recherche. Lorsque l’on m’a libérée, suite à la fracture qui m’a sauvée, ils m’ont dit : “si tu oses dire à ton mouvement, si les choses se répandent sur les réseaux sociaux, on va t’exterminer, tu n’es rien on va te réduire à rien”. Je pleurais, je voyais ma mort. Je suis allée à l’hôpital où ils m’ont prise en charge, j’y suis restée pendant 7 jours. Comme j’ai été violée, ils m’ont donné des traitements par prévention. Ils ont appelé ma mère et je suis restée à la maison deux mois avec le plâtre. Ca, c’était au mois d’avril. Au mois d’août, j’ai commencé à recevoir des menaces au téléphone. Je me rappelle qu’une fois j’étais sortie acheter du pain juste au coin et le soir on m’envoyait une photo de moi à la boulangerie avec un message : «juste pour te dire que nous te surveillons».

Là je me suis dit, je dois tout faire pour quitter ce pays, si je reste, ce sera ma mort. J’avais déjà mon passeport pour me permettre de sortir, pour faire des achats de marchandises. Mes amis m’ont aidé à trouver un facilitateur, il avait son agence, il aidait des gens pour le voyage. Je lui ai dit que je devais partir le plus tôt possible mais sans lui expliquer mon problème, parce que j’avais peur de tout le monde. Un autre homme souhaitait aussi partir, il était commerçant donc il avait beaucoup de visas. Le facilitateur voulait faire comme si nous étions mari et femme et même aller chercher un acte de mariage à la Mairie. Il m’a demandé 2000 $ et il a tout arrangé. Le jour où je suis allée récupérer le visa à l’ambassade, les agents avaient déposé une convocation chez moi. Mes bagages, mes documents, tout était déjà en place. Je les ai pris et je suis allée me cacher dans mon église. Le pasteur est allé voir un ministre qui priait ici et lui a dit «tu dois aider ma fille qui prie ici, elle est recherchée, il faut l’aider». C’est lui qui m’a payé le billet jusqu’ici. Il m’a dit “je sais comment la police marche, si tu restes et qu’ils te retrouvent, je les connais bien, tu ne vas pas vivre”. Ce jour-là, il m’a escorté jusqu’à l’aéroport. Il a pu m’amener directement dans la salle d’attente car c’est une autorité de l’Etat. Puis je suis montée dans l’avion jusqu’à la Grèce et jusqu’ici.

Là je me suis dit, je dois tout faire pour quitter ce pays, si je reste, ce sera ma mort. Moi, j’étais sauvée, mais lorsque j’étais à l’église, une deuxième convocation a été déposée chez moi pour que je me représente le 7 novembre 2022. Or, c’était le jour de mon vol d’avion. Le 12, ils sont venus à la maison me chercher. Mes enfants étaient au salon, ma mère était dans sa chambre, elle dormait, elle était déjà malade. Vers midi, ma mère a attendu les cris des enfants au salon et les policiers en tenue sont rentrés dans sa chambre en fouillant même en dessous du lit. Elle a paniqué, ils lui ont demandé où j’étais, elle pleurait, les enfants pleuraient. Elle est allée se cacher chez son cousin puis elle a pris une pirogue pour aller à Brazzaville avec les enfants. C’est comme ça qu’elle a fui. De Brazzaville, elle m’a appelé, elle m’a expliqué ce qu’il s’était passé. Je pleurais. En principe, l’infraction est individuelle. Mais chez nous, pendant une enquête, on peut mettre en garde à vue la personne la plus proche de vous jusqu’à ce que vous soyez arrêté. Or si on arrêtait ma mère, elle aurait pu mourir, elle a fui pour se sauver. Moi, j’ai eu de la chance parce qu’à ce moment-là on avait pas encore lancer l’avis de recherche aux frontières et parce que j’ai été escortée par le ministre. 

Aujourd’hui, j’ai meilleure mine, avant je ne souriais pas, je pleurais tout le temps et je n’arrivais pas à manger. Je n’étais pas moi, je n’avais pas la vie, je n’arrivais pas à dormir. Je devais aller voir un psychiatre, prendre des médicaments, voir un psychologue, sexologue, sophrologue, parce que je ne trouvais pas de sens à la vie. Très souvent j’avais envie de mettre fin à ma vie. Mais je suis leur seul espoir de mes enfants, à chaque fois qu’on se parlait et qu’ils me disaient : «Maman, on t’aime», je pleurais, je me disais : je dois me battre, un jour on se reverra.

Oui, j’appelle ma famille. C’est rare avec les personnes de Kinshasa, je ne peux pas appeler tout le monde, je ne sais pas qui est qui. Même ceux de mon mouvement ils ne savent pas où est ce que je suis à présent. Si j’arrivais à obtenir la protection, je pourrais parler, je pourrais leur dire où je suis. Mais pour le moment, je préfère me taire.

Oui, j’en connais 2. Il y en a une qui est en Australie et une autre qui est partie en Ukraine mais maintenant, avec la guerre, je ne sais pas. Mais il y en a d’autres comme moi qu’on menace, qu’on emprisonne, qu’on libère. Puis il y’a ceux qu’on arrête et qu’on torture. Il y a des cas de viols, des cas de viols de proches pour atteindre la personne visée, des cas de passages à tabac.

Mais bien sûr, je vous dis, la situation est très précaire à Kinshasa. Pour te donner un exemple, depuis 2018, j’étais fonctionnaire de l’Etat mais tu travailles sans percevoir de salaire. C’est quel pays ça ? 

« Oui, il y a les jeunes qui ont compris qu’ils doivent lutter, militer, se révolter. Oui, il y a de l’espoir.« 

C’est pour cela que j’ai été obligée de chercher un autre emploi pour subvenir à mes besoins sinon ça allait être très compliqué. Fonctionnaire c’est bien parce que c’est une carrière à vie, mais dans le privé j’étais payée. Donc il faut faire un peu des petits commerces pour bien vivre.

Les autorités, elles, lorsqu’elles accèdent au pouvoir, elles n’ont pas beaucoup de moyens mais il faut les regarder quelques mois après. Ils construisent des immeubles, il y a des détournements de fonds. Un député touche 21000$ par mois mais un enseignant touche 100$ par mois. Mais quel écart, pourquoi ça ?

Oui, il y a les jeunes qui ont compris qu’ils doivent lutter, militer, se révolter. Oui, il y a de l’espoir. » Demain les choses changeront. Mais ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir ont simplement remplacé ceux d’avant, c’est un cercle vicieux.

La communauté internationale oui, mais il faut qu’il y ait aussi la volonté des autorités congolaises. On peut toujours accuser la communauté internationale mais qu’est ce que l’Etat fait ? Il y a beaucoup de choses à faire. Il faut majorer les salaires des fonctionnaires, améliorer la vie sociale mais rien ne se passe. Il y a aussi les retards de salaire. A la fin du mois, lorsque l’on travaille, on est censé recevoir un salaire, afin de payer le loyer, nourrir sa famille, payer les études, mais on se retrouve avec 5 ou 6 mois d’arriérés. C’est la corruption et le vol qui finit par se développer. 

Oui il m’a aidé, mais c’est parce que le pasteur le lui a demandé. C’est un cas particulier. Mais que par eux-mêmes les politiques se lèvent contre le Président, je pense qu’ils n’oseraient pas, il y a trop de risques.

Oui à l’Est, il y a des massacres par le M23.

J’ai été à Goma mais je n’ai fait que 2 semaines. Mon compagnon y était, c’était en 2018. Il était militaire, il avait une mission là-bas donc j’étais obligée de le suivre. Pendant cette période, il y avait vraiment des affrontements entre les FLDR et le M23 [ndlr, les FLDR sont les Forces Démocratiques de Libération du Rwanda. C’est un groupe armé formé en RDC en 2000. Ils défendent les intérêts des Hutus rwandais réfugiés en RDC et sont opposés à la présidence de Paul Kagame]. Mon compagnon m’avait demandé de rentrer pour rester avec les enfants mais, 2 semaines après, il est décédé dans une embuscade. C’est ce qui a fait que je suis allée au Sankuru, s’il avait été vivant, il aurait pas aimé que j’aille là-bas, travailler au sein de la politique.

C’est aussi la communauté internationale qui doit peser. On ne comprend pas comment un petit pays comme le Rwanda persiste. Mais c’est parce qu’il est appuyé par les Occidentaux, par les Américains. Ils nous combattent parce qu’à l’Est il y a des richesses.

« On demande à l’homme de violer sa femme ou son enfant en la présence des enfants. Si tu n’obéis pas, on te tue« 

Exactement, maintenant eux profitent du désordre de la guerre pour pouvoir piller le coltan et le cobalt. 12 millions de morts. C’est beaucoup. Les hommes, les femmes et les enfants fuient la guerre. Il y a ceux qui meurent sur la route, ceux qui n’ont pas d’abris, ceux qui ne peuvent pas étudier, les femmes qui sont violées, on les coupe à la machette, on demande à l’homme de violer sa femme ou son enfant en la présence des enfants. Si tu n’obéis pas, on te tue. Beaucoup d’atrocités. C’est douloureux de voir le Congo comme ça.

Oui, il y a un génocide, derrière lequel il y a le M23, les Ougandais et les Rwandais. Ils viennent s’accaparer nos villages, juste pour piller. Ils tuent seulement pour le minerai. Ils veulent que l’est du pays leur appartienne, en raison des richesses qu’il y a là-bas. Il faut vraiment que la communauté internationale nous soutienne pour arrêter la guerre.

Propos recueillis par Clara Lenôtre.

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